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ACTIONS ET PRISES DE POSITION AU FIL DU TEMPS - 2007 -

Travailleuse sociale de Belfort : communiqué Maison Départementale des Femmes « Louise Weiss" (juillet 2007)

Maison Départementale des Femmes « Louise Weiss » (CIDFF, Femmes actives, Pluri’elles, Solidarité femmes) 23, rue de Mulhouse – 90 000 BELFORT - 30 juillet 2007

Pour faire suite à la mise en accusation de l’une de leurs professionnelles, les Associations de la Maison Départementale des Femmes « Louise Weiss » de Belfort, souhaitent à nouveau dénoncer les conditions des femmes immigrées victimes de violences.

Depuis plus d’un an, avec la Ligue des Droits de l’Homme et Parenthèses à la Violence, nous alertons Monsieur le Préfet et les députés du Territoire de BeLfort sur la situation très préoccupante des femmes étrangères.

Nous rappelons qu’en France : 1 Femme meurt tous les 3 jours de violences dans le cercle familial et 1 autre meurt par ricochet. (Ministère de la Cohésion Sociale et de La Parité, 2006) Parmi les femmes victimes de violences conjugales, se trouvent de nombreuses femmes étrangères qui sont le plus souvent mariées à des Français ou des étrangers en situation régulière.

Leur vie conjugale devient progressivement un enfer car leur devenir dépend du bon vouloir de leur conjoint qui dispose d’un grand nombre de moyens de pression sur elles. En effet, les conjoints, qu’ils soient français ou étrangers, connaissant la rigueur de la réglementation française en matière d’immigration, usent et abusent des failles du droit d’entrée et séjour concernant leur épouse de nationalité étrangère.

Ils peuvent par exemple faire pression sur leur épouse par le biais de l’obligation légale, et indispensable, de prouver le maintien de la vie commune pour obtenir la délivrance ou le renouvellement du titre de séjour.

Ainsi, en refusant d’accompagner son épouse à la préfecture pour confirmer le maintien de la vie commune, le conjoint la maintient dans une situation irrégulière de séjour. En outre, et c’est ce qui est le plus incompréhensible pour ces femmes, si l’époux ne fait pas cette démarche administrative, rien, ni personne ne peut l’obliger à la faire. Le conjoint, pour sa part français ou en situation régulière de séjour, n’est jamais inquiété ni responsabilisé quant à la présence « irrégulière » de sa conjointe en France.

Compte tenu de cette rigueur légale et administrative pour obtenir la délivrance ou le renouvellement du titre de séjour, les femmes immigrées se trouvent à la merci de leur conjoint (et de l’entourage de ce dernier...) et doivent se soumettre à sa volonté. Elles endurent les insultes, les brimades, les coups, les pratiques qui s’apparentent à de l’esclavagisme .... car elles comprennent que leur sort est entre les mains de leur époux. Ainsi, des femmes peuvent être victimes de violences mais n’osent pas les dénoncer. Elles se terrent par crainte de ne plus avoir de titre de séjour et d’être ensuite rejetées par la société française. D’autres ont quitté leur conjoint violent. Elles ont dénoncé les violences subies pour y mettre fin. Elles ont déposé plainte pour faire reconnaître leurs droits. Dans ce cas, le Préfet a le pouvoir de renouveler leur titre de séjour obtenu en raison du mariage. Toutefois, ce n’est pas un droit. Cette faculté de régularisation est largement laissée au pouvoir d’appréciation du Préfet.

Que la plainte de ces femmes aboutisse ou non à la condamnation de l’agresseur, nous constatons souvent dans les faits que le titre de séjour n’est pas renouvelé. Ainsi, les motifs qui les ont poussé à la rupture de la vie commune sont vite omis par les pouvoirs publics. Aujourd’hui, ces femmes reçoivent une obligation de quitter le territoire français. Plus rien n’y fait, et cela, même après avoir organisé et démontré leur autonomie personnelle, professionnelle ou leur facilité d’intégration et d’attachement aux valeurs républicaines. Elles font face à un choix inacceptable que nous appelons « double violence »
- quitter leur conjoint violent, et risquer te non renouvellement de leur titre de séjour,
- garantir la régularité de leur séjour au péril de leur santé physique et psychique.

Elles sont expulsées vers leur pays d’origine où être femme n’est pas toujours bon, et encore moins une épouse rejetée ! où être femme risque de tes exposer à des formes de relégations qui peuvent parfois conduire au suicide ou à la prostitution.

La relégation peut prendre diverses formes comme l’enfermement, l’exclusion du logement, du travail, de ta société en général.

Elles sont exclues de France pour avoir dénoncé des violences vécues et dont souvent l’auteur ne sera pas inquiété, ni mis face à ses responsabilités pénates, civiles et administratives. Quel avenir peut-il y avoir pour ces femmes dans ces conditions ?

Nos lois restent incomplètes quant au sort des femmes étrangères en France et aux spécificités qui les entourent.

Nos réglementations divergentes (droit de séjour par opposition au droit pénal et civil contraignent ces femmes à rentrer dans la clandestinité avec tous les dangers imaginables que génère cette situation.

Elles ont refusé de subir en silence des violences.

Elles ont cru que, dans notre beau pays des Droits de l‘Homme, leur témoignage, leur parole seraient pris en compte. Mais la réalité est tout autre ; comme réponse à leurs espoirs, elles se voient sanctionnées et donc expulsées.

Nous sommes tous et toutes concernés par la situation de ces femmes.

En ce moment, à Belfort, une procédure d’expulsion est en cours à l’égard d’une femme qui a eu le courage de dénoncer les violences subies. Combien de procédures similaires sont en cours et dont nous n’avons pas connaissance ? Nous demandons pour toutes les femmes qui sont ou peuvent être dans cette situation :
- la régularisation de leur situation administrative indépendamment de la procédure judiciaire envisagée contre les violences conjugales,
- une redéfinition des modalités d’application de la toi en matière d’entrée et séjour en France.

Enfin, nous revendiquons le droit à tout être humain d’être respecté et de bénéficier d’une protection de son intégrité physique et morale.

Le système actuel ne prend pas suffisamment en compte leur situation et les conséquences en cas de retour dans leur pays ; ce qui constitue pour nous une violation des droits humains et des valeurs républicaines de notre pays.

Le 16 Juillet 2007, Catherine BERNARD Assistante Sociale à Solidarité Femmes à Belfort, a été contactée sur son lieu de travail par la Police aux Frontières. Elle a été appelée à se présenter le 17 Juillet 2007, pour clarifier la situation d’une femme immigrée victime de violences conjugales, qu’elle a rencontrée dans l’exercice normal de ses missions professionnelles (accueil, accompagnement, aide auprès de personnes victimes de violences conjugales). Convoquée dans le cadre de l’instruction, elle se retrouve placée en garde à vue et elle découvre qu’elle est mise en cause pour le motif « d’aide au séjour irrégulier ».

Les Associations de la Maison Départementale des Femmes « Louise WEISS » : Centre d’information des Droits des Femmes et de la Famille, PLuri’elles et Femmes Actives s’associent et soutiennent Solidarité Femmes, estimant qu’il est inconcevable et inacceptable de voir ainsi une salariée se retrouver dans une telle situation de mise en accusation. Intervenant depuis toujours aux côtés des personnes les plus en difficultés pour faire reconnaître leurs droits, nous souhaitons que tout professionnel, travaillant dans le champ de l’action sociale puisse être protégé de tels agissements. Par ailleurs, la loi du 26 novembre 2003 précise qu’ « une personne qui agit afin de répondre à un danger grave et imminent menaçant la vie ou l’intégrité physique de l’étranger ne peut pas être condamnée pour aide au séjour irrégulier d’un étranger ».

Nous demandons aux employeurs publics et privés du secteur sanitaire et social, d’intervenir auprès du Ministère de la Justice et du Ministre de l’intérieur pour que de tels faits ne puissent plus se répéter.

Nous ne voulons plus que d’autres professionnels du social, de la santé, de l’éducation, de la justice, recevant une personne de nationalité étrangère, puisse subir le même sort que Catherine BERNARD assistante sociale ; ou Olivier PIRA éducateur spécialisé à Lille dont nous apprenons qu’il a vécu en 2004, une situation similaire dans l’exercice de sa profession auprès de jeunes mineurs et majeurs en difficultés.

Comme il le souligne : « Il ne manque pas d’assistantes sociales de circonscription ou hospitalières, d’éducateurs, d’infirmiers..., qui sont quotidiennement en contact avec des populations étrangères, en situation irrégulière ou non qui demandent aide, assistance ou conseil aux services sociaux ou sanitaires ou accueillis en centre d’hébergement. Si le seul fait de recevoir, conseiller, accompagner ou soigner ces personnes implique potentiellement gardes à vues et mises en causes, alors ce serait un pas supplémentaire dans la négation des libertés publiques, vers l’état pénal qui fait perdre tout son sens à un travail social fondé sur le respect des personnes et de leur dignité ».

Les militantes, les professionnelles des Associations de la ‘Maison Départementale des femmes « Louise WEISS » affirment leur volonté d’accueillir, d’aider, d’assister, de protéger toutes les personnes victimes de violences quelque soit leur statut juridique ou administratif. Nous revendiquons donc le droit à tout être humain d’être respecté et de bénéficier d’une protection de son intégrité physique et morale.

Le système actuel ne prend pas suffisamment en compte leur situation et les conséquences en cas de retour dans leur pays ; ce qui constitue pour nous une violation des droits humains et des valeurs républicaines de notre pays.

30 juillet 2007